CAITLIN CRONENBERG TRACE SA PROPRE VOIE AVEC SON PREMIER FILM, «HUMANE»

TORONTO — Son nom de famille est synonyme de cauchemars cinématographiques, mais Caitlin Cronenberg dit qu'elle ne se sent pas obligée d'être à la hauteur de l'héritage de son célèbre père lorsqu'elle accède à la chaise de réalisatrice.

Le premier long métrage de la Torontoise, intitulé «Humane», sort vendredi, et elle est bien consciente qu'il invitera à des comparaisons avec le travail plus sombre du pionnier canadien de l'horreur David Cronenberg, dont les films marquants incluent «Rage» («Rabid»), «La Mouche» («The Fly») et «Alter Ego» («Dead Ringers»)

«Je suis sûre qu'il y a certaines attentes des gens quant au genre de cinéaste que je vais être, au genre de film que je vais sortir», a confié la femme de 39 ans lors d'une entrevue à Toronto.

«J’essaie de ne pas trop y penser ni de m’en inquiéter parce que j’ai assez confiance en moi en tant qu’artiste. Je sais ce que j'essaie de faire. Alors je suis désolée pour les gens qui seront déçus que ce ne soit pas plus un film d'horreur sur le corps humain ou plutôt de science-fiction, mais on ne peut pas plaire à tout le monde.»

«Humane» a ses moments gore, mais Cronenberg dit qu'elle n'essayait pas de suivre les traces macabres de son père ou de son frère Brandon, qui a fait ses débuts au cinéma en 2012 avec l'horreur de science-fiction «Antiviral».

Elle décrit son film comme une «comédie-suspense satirique et sombre d’horreur» sur une dynamique familiale fracturée.

Le film se déroule pendant un effondrement écologique qui oblige les dirigeants du monde à prendre des mesures draconiennes pour lutter contre la surpopulation. Peter Gallagher incarne un patriarche dont le projet de «s'enrôler» dans la nouvelle initiative d'euthanasie du gouvernement pousse ses enfants – interprétés par Jay Baruchel, Emily Hampshire, Alanna Bale et Sebastian Chacon – dans une violente dispute.

Dans «Humane», Cronenberg évite largement les éléments dégoûtants souvent associés aux œuvres de son père et de son frère, privilégiant plutôt l'humour noir.

«Nous sommes tous très différents», a confié Caitlin Cronenberg à propos de sa famille.

«Je suis heureuse d'être influencée par la famille dans laquelle j'ai grandi, comme je pense que tout le monde l'est, pour le meilleur ou pour le pire. Mais pour moi, il s'agit simplement de ce que j'essaie de créer dans le monde. Je suis heureuse que ce soit différent.»

Des débuts comme photographe

Cronenberg s'est déjà fait un nom en tant que photographe, avec ses portraits de célébrités apparaissant dans des publications telles que le «New York Times», «Vanity Fair», «Variety» et «Esquire». Elle a également photographié la pochette très mémorable de l’album «Views» de Drake en 2016, dans laquelle le rappeur torontois est vu assis au sommet de la Tour du CN.

Elle a déjà essayé la réalisation. En plus de réaliser plusieurs vidéoclips, elle a coréalisé le court métrage de 2018 «The Endings», basé sur un livre photo qu'elle a coécrit avec la scénographe Jessica Ennis. Le court métrage mettait en vedette les actrices Julianne Moore, Keira Knightley et Tatiana Maslany. 

Elle a également produit et tourné «The Death of David Cronenberg» en 2021, un court métrage surréaliste d’une minute que son père a réalisé et dans lequel il a joué.

Cronenberg dit qu’entrer dans le monde du long métrage était une progression naturelle. Elle envisageait déjà cette idée lorsque le scénariste et producteur de «Humane», Michael Sparaga, lui a envoyé par courriel la première ébauche en 2019 avec comme sujet: «Avez-vous déjà pensé à réaliser un long métrage?»

Tandis que son père et son frère écrivent et réalisent, Cronenberg dit qu'elle imagine les choses visuellement avant d'y penser sur une page.

«Évidemment, mon père et mon frère ont aussi un sens incroyable du style visuel, mais je pense que c'est juste un ordre d'activités: je passe d'abord par le visuel et eux par le script», a-t-elle expliqué.

L'importance du décor

Ce qui l'a frappée visuellement dans le scénario de «Humane», c'est le niveau de détail qu'elle pouvait obtenir avec le décor – la majeure partie du film se déroule lors d'une réunion de famille sous un même toit. Il a été tourné dans un manoir de Hamilton pendant quatre semaines en 2022.

«Quelque chose de très important pour moi était la façon dont la lumière raconte une histoire au début de la journée, quand il s'agit plutôt d'un drame familial», a-t-elle indiqué.

«La lumière a un type de ton et une sensation spécifiques (plus tôt), puis la seconde moitié du film a un ton et une sensation très différents, plus sombres, ce qui est un choix d'éclairage très délibéré que nous avons fait.»

David Cronenberg a fait une apparition en tant que voisin, mais la scène a finalement été coupée.

«Ce n’était pas (à cause de) sa performance. Il a très bien fait», a-t-elle soutenu, précisant qu'il s'agissait simplement d'une décision de montage.

Même si son père a fourni des notes sur le film, Cronenberg affirme qu'elles étaient minimes.

«Je pense que mon père est convaincu que je suis prête à faire ce que j'essaie de faire. Je ne pense pas qu'il s'en inquiétait trop», a-t-elle relaté.

«C'est un père encourageant, qu'il soit réalisateur ou non. C'était donc vraiment amusant de l'avoir sur place et de lui montrer les premiers montages. Je suis également parent et je pense qu'on est excité lorsque notre enfant fait quelque chose qui le rend heureux. Je pense (qu'il est) juste heureux que je sois heureuse et fier que je fasse ce que j'aime.»

Alex Nino Gheciu, La Presse Canadienne

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