«THE EXORCISM»: NOTRE PèRE QUI êTES AUX ENFERS

Anthony Miller, un acteur alcoolique ayant recouvré sa sobriété depuis quelques années, a entamé un « mea culpa ». Cela, autant dans sa vie personnelle, avec sa fille, Lee, qui lui en veut amèrement, que dans sa vie professionnelle, en l’occurrence moribonde. Or, voici sa carrière en voie d’être ressuscitée lorsqu’il décroche le rôle d’un prêtre devant exorciser une adolescente possédée dans le remake d’un célèbre film jamais nommé. L’ennui, c’est qu’Anthony semble avoir poussé la « méthode » de jeu jusqu’à devenir lui-même possédé, au grand désarroi de Lee. Exercice de méta-cinéma intime et complexe, The Exorcism voit le cinéaste Joshua John Miller rendre hommage à son père, Jason Miller, vedette jadis du chef-d’oeuvre The Exorcist (L’exorciste).

À cet égard, s’il est une réplique révélatrice dans The Exorcism, c’est celle où le personnage du réalisateur qui met en scène le film dans le film déclare : « C’est n’est pas vraiment un film d’horreur. C’est plutôt un drame déguisé en film d’horreur. »

Certes, le passage a des relents satiriques, et les penchants manipulateurs et prétentieux dudit personnage prouvent que, par-delà tout ce simulacre, Joshua John Miller ne se prend pas trop au sérieux. Il reste qu’il y a du vrai dans ladite affirmation.

Pour autant, The Exorcism ne manque pas d’éléments horrifiques, car c’est bel et bien un « film de possession », mais un film de possession aux sens à la fois littéral et métaphorique. Le cinéaste y parle, par l’entremise du scénario coécrit avec son partenaire de travail et de vie M.A. Fortin, de son père et des démons qui l’habitaient (au figuré).

Or, Joshua John Miller parle aussi de lui-même, ce nouveau film lui ayant servi, comme il nous le confiait en entrevue, à exorciser (au figuré, bis) une précédente expérience professionnelle traumatisante liée au fait d’être un homme queer à Hollywood.

D’où la décision de subvertir le schéma traditionnel du film de possession et d’insuffler à celui-ci une dimension queer. En cela que d’habitude, une enfant, une adolescente ou une jeune femme possédée est sauvée par un homme d’Église. Dans The Exorcism, c’est Lee qui, avec l’aide de sa petite amie, Blake, sauve Anthony.

Plus fascinant qu’épeurant

De cette démarche à moult paliers de lecture émerge un film plus fascinant qu’épeurant. Normal, puisque Joshua John Miller cherche davantage à intriguer qu’à effrayer.

Il n’empêche, au vu du titre et de l’appartenance indéniable de The Exorcism au sous-genre du film de possession, une majorité de gens s’attendra à des frissons. Il y en a, mais pas tant que ça. L’intérêt, car intérêt, il y a, réside ailleurs : dans les intrications « méta ».

Dans The Exorcism en effet, tout ou presque est jeu de miroirs ; tout ou presque est mise en abyme.

Il y a bien sûr l’oeuvre en cours de tournage à l’intérieur du film, qui n’est pas une simple (méta)fiction, mais bien le remake d’une des productions les plus célèbres de l’histoire du cinéma, avec tout ce que cela comporte d’allusions, de clins d’oeil, de reconstitutions…

Il y a ensuite le protagoniste, Anthony Miller, en partie inspiré de l’acteur et dramaturge Jason Miller (né John Anthony Miller), qui souffrait lui-même d’alcoolisme…

Il y a également la présence de Russell Crowe, qui est, en elle-même, « connotée » : l’acteur joue un acteur jouant un prêtre exorciste, un an après avoir tenu le rôle d’un prêtre exorciste dans The Pope’s Exorcist (L’exorciste du pape), d’après les exploits allégués d’un vrai prêtre exorciste… Crowe qui, au commencement de sa carrière, était notoirement connu pour son approche « méthode » du jeu…

Plus l’on scrute The Exorcism, de sa structure à ses mille détails narratifs en passant par les profils référencés de ses personnages, et plus c’est vertigineux. À défaut de faire dresser les cheveux.

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