UNE BOURRASQUE POP-PUNK DES MARITIMES DéFERLE SUR LES FRANCOUVERTES

La rumeur de cette bourrasque pop-punk déferlant des Maritimes s’était rendue jusqu’à nos rives montréalaises, mais jamais nous n’avions anticipé qu’elle allait ainsi souffler le palmarès préliminaire des 27es Francouvertes. La dernière soirée de la ronde préliminaire mercredi a ramené à neuf concurrents les prétendants aux grands honneurs, et c’est le quatuor néo-écossais Peanut Butter Sunday qui s’est emparé de la première position, suivi par Jeanne Côté et Parazar. Les trois dernières soirées préliminaires auront secoué l’ordre des demi-finalistes, voyons-y de plus près.

Ce sont eux qui le disent sur scène : leurs chansons parlent de bière, des amis, et de boire de la bière avec les amis. Voici Peanut Butter Sunday, quatre jeunes hommes originaires de Baie–Sainte-Marie, complices du P’tit Belliveau, qui ont ressorti lundi soir dernier le livre de recettes de la vague pop-punk post-californienne du tournant du millénaire.

Avec efficacité dans les mélodies, les motifs de guitare et la dégaine adulescente, mais sans prendre trop de distance avec ses influences (Blink 182, Green Day, voyez le genre), sinon pour ce détail crucial : les chansons sont écrites et interprétées avec ce français de la Baie que l’on se retiendra de qualifier de chiac de peur de se faire dire par un Acadien avisé que ce mélange de mots anglais et d’expressions étranges ne peut être qualifié de chiac authentique (nous nous sommes déjà fait corriger).

Du gros fun noir — qui est, ou pas, aussi une expression à Baie–Sainte-Marie. Leurs chansons, certaines éditées sur l’EP Quoi-ce y’a pour souper ? paru l’automne dernier (sur étiquette Acadian Embassy, une pépinière de rock jovial des mêmes eaux salées !) ont visiblement touché une corde auprès du public-jury — à eux la pole position.

Le même lundi soir, le projet BRUE, de la compositrice et guitariste Sarah Michel-Brunnemer, a fait forte impression. La musicienne mène en parallèle un projet jazz, mais pour les Francouvertes, elle a dévoilé sa facette alt-rock exhibitionniste, arrivant sur scène dans un costume d’effeuilleuse dansant autour d’un poteau.

La guitare bien en laisse, elle a balancé, avec ses deux accompagnateurs, une collection de chansons brûlantes, acerbes et pertinentes qui ont fait une aussi belle impression que ses commentaires (engagés et baveux) entre les chansons. Assuré et plein d’esprit : BRUE détient la sixième position sur neuf, mais on le croit capable de se rendre en finale. Le même lundi soir, le projet électro-pop-rock gLohm (Olivier Landry-Gagnon) n’a pas réussi à faire la même impression, ambivalent en jonglant avec ses influences musicales et affichant une présence scénique tout aussi fragile.

Les concurrents de l’affiche rap du mardi soir ont fait chou blanc : tant Sloan Lucas, Sami que Menura n’auront su percer le palmarès préliminaire. La première avait pourtant des textes substantiels, militants — ce commentaire sur l’industrie musicale (Paye ta pub) visait dans le mille — et une technique admirable, mais une aisance sur scène encore frêle. S’ouvrant sur ses racines syriennes, Sami affichait en revanche plus d’assurance ; il aurait pu prétendre à une place dans le palmarès, mais le jury en a décidé autrement. Enfin, Menura (Nicolas Boivin) prétendait proposer un rap alternatif, qui en vérité était de la pop déguisée par des rythmes plus hip-hop (propulsés par un orchestre complet) et l’autotune en vogue. Dans cette soirée, il a paru le plus à l’aise, mais ses compositions ne faisaient pas le poids en comparaison d’avec celles de ses collègues.

Heureusement, le hip-hop n’a pas été exclu du palmarès préliminaire. Retenez ce nom : Parazar, qui a atterri en troisième position après sa performance de mercredi soir dernier. Quelle claque elle nous a livrée ! Le texte, la prosodie, le groove percutant qui empruntait à la musique populaire de ses racines algériennes, la présence décontractée et autoritaire, l’aplomb de ses commentaires entre les chansons, la musicienne a aisément mis le Lion d’Or dans sa poche. Elle a confié s’être mise au rap il y a seulement quatre ans, on devine tout le travail qu’elle a abattu pour arriver sur scène avec une proposition aussi professionnelle. Peu importe l’issue de cette 27e édition des Francouvertes, si Parazar persiste, elle fera sa marque.

Originaire de l’Est ontarien, le duo De Flore (Sarah-Anne LaCombe et Mathieu Gauthier, accompagnés de la meilleure batteuse de cette édition des Francouvertes) distillait mercredi soir une chanson pop aux accents disco et dance, attachante et colorée, mais dont on entendait encore les faux plis dans la composition. La chanson, tout aussi pop et dansante, d’Emmanuelle Querry aura convaincu davantage les jurys — sans doute que sa présence sur scène et les couleurs R&B de ses chansons ont joué en sa faveur, lui permettant de se faufiler en demi-finales des Francouvertes, qui se tiendront les 17, 18 et 19 avril prochains. C’est un rendez-vous.

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